Contexte
La Belgique est un des pays où les revenus du travail sont parmi les plus lourdement taxés en Europe tandis que les revenus du capital sont, en comparaison, beaucoup moins taxés (les plus-values étaient jusqu’ici quasiment exemptes d’imposition).
La Belgique était aussi un des derniers pays de l’UE n’ayant pas instauré de taxe sur les plus-values. Ce rééquilibrage était nécessaire et répond aussi à une réalité économique de plus en plus marquée : la part de la richesse mondiale captée par le capital ne cesse de croître. Adapter la fiscalité à cette évolution, c’était rendre notre système plus juste et plus crédible.
Qui ?
La taxation des plus-values est applicable à l’impôt des personnes physiques (en dehors d’une activité professionnelle) et à l’impôt des personnes morales (ASBL, fondations, etc.).
Quels revenus ?
On parle de plus-values sur des actifs financiers. Ceux-ci sont définis de manière large :
- Instruments financiers belges et étrangers (actions, obligations, produits dérivés, quotas d’émission, ETN, ETF, …) ;
- Certains contrats d’assurance belges ou étrangers (“vie” -> branche 21, 22 ou 26 – “investissements” -> branche 23 ou 44 et similaires à l’étranger) ;
- Crypto-actifs ;
- Devises : (i) moyens d’argent au sens strict, (ii) or d’investissement et une liste de pièces d’or spécifique et (iii) les monnaies numériques de la banque centrale.
Quels tarifs ?
Principalement deux régimes coexistent et ce, avec des tarifs différents : un régime spécifique pour les participations importantes dans des actions/parts d’une part et un régime général d’autre part. Les moins-values de l’année sont déductibles.
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Dans quels cas ?
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Tarifs
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Régime spécifique si participations importantes
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Uniquement actions ou parts de personnes morales.
Condition à respecter : détention (in)directe par un contribuable de + de 20% des actions ou parts.
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Exonération de 1.000.000€.
Tarif progressif :
– entre 1 et 2,5 Mio€ = 1,25% ;
– entre 2,5 et 5 Mio€ = 2,25% ;
– entre 5 et 10 Mio€ = 5% ;
– à partir de 10 Mio€ = 10%.
Mesure “anti-saucissonnage” : l’exonération de 1.000.000€ ne peut être obtenue que tous les 5 ans par la même personne*.
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Régime général
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Catégorie résiduelle (= dans les autres cas de figure) |
Exonération de 10.000€ (indexé).
Tarif de 10%.
L’exonération de 10.000€ est une exonération annuelle. En plus de celle-ci, 1.000€ par an non utilisés sont transférables jusqu’à une exonération de maximum 15.000€ par an. |
*L’intention est d’éviter qu’une personne détenant 100% des actions et ayant une plus-value latente de 5 Mio€ ne “saucissonne” la plus-value chaque année sur 5 ans, bénéficiant ainsi chaque année de l’exonération de 1 Mio€ et ne payant au final aucun impôt.
Quelles exonérations ?
Sont exonérées d’impôt les plus-values suivantes réalisées :
- sur des produits d’assurances 2ème ou 3ème pilier de pensions (celles qui ont bénéficié d’une réduction d’impôt pour épargne à long terme) ;
- sur des actions ou parts de start-ups / scale-ups (entreprises qui peuvent bénéficier de la réduction d’impôt tax shelter) ;
- par des associations et fondations agréées (pour lesquelles les dons réalisés à ces associations/fondations peuvent être déduits).
Exit tax
Si un contribuable quitte la Belgique et réalise sa plus-value dans les 2 ans en étant résidant fiscal dans un pays étranger, la Belgique conservera son pouvoir d’imposition et pourra imposer la plus-value correspondante à la plus-value réalisée quand le contribuable était résident fiscal belge. Sans cette mesure, il suffirait à un contribuable de déménager en Suisse pour réaliser l’entièreté de sa plus-value réalisée sur le territoire belge sans payer d’impôt.
Cohabitation avec les autres régimes existants ?
À noter que les régimes existants restent d’application : (i) régime 19bis/Taxe Reynders, (ii) taxe de 33% si hors gestion normal du patrimoine privé (la définition des cryptos qui resteront visés par cette mesure devrait être clarifiée) et (iii) taxe de 16,5% sur la cession de participations importantes (+ de 25%) hors EEE (l’exonération de 1.000.000€ devrait rester applicable dans ce cas de figure).
En pratique ?
En principe, la base imposable est égale à la différence entre le prix reçu et la valeur d’acquisition.
Mais les plus-values historiques (réalisées avant le 31 décembre 2025) sont exonérées.
Mesure transitoire pendant 5 ans : si la valeur d’acquisition est supérieure à la valeur au 31 décembre 2025, on pourra prendre la valeur d’acquisition (pour éviter de taxer le cas où l’actif financier aurait perdu de la valeur au 31 décembre 2025 et qu’au moment de la vente on n’aurait en réalité pas réalisé de plus-value “économiquement parlant”).
Au moment de la réalisation de la plus-value, pour le régime général, les banques/assurances vont prélever la taxe à la source (“brute”) et le contribuable pourra l’année d’après, via sa déclaration fiscale, réclamer la déduction des moins-values de l’année et l’exonération des 10.000€. Il y aura un “Système opt-out » qui permettra au contribuable de privilégier la déclaration via sa déclaration fiscale sans que la banque/l’assurance ne prélève à la source. Dans ce cas, les banques/assurances devront transmettre une fiche avec les informations nécessaires.
Il n’y aura pas de prélèvement à la source pour le régime spécifique (participations importantes).
Exemples pratiques :
- Une personne a investi à partir du 1er janvier 2026, 300.000€ de son capital. Avec un rendement de 4%, si elle vend ses actifs après 1 ans et réalise une plus-value de 12.000€ (capital à la sortie = 312.000€), en considérant qu’elle n’a pas réalisé de moins-value cette année-là et qu’elle peut bénéficier de l’exonération de 10.000€, la taxe plus-value s’élèvera à 200€ (10%*2.000€), soit une taxe de 1,67%
- Un entrepreneur a exercé son activité économique en société toute sa vie. Il détient 100% des participations et vend sa société à la fin de sa carrière à un repreneur. Sachant qu’il s’est distribué des dividendes taxés toutes sa vie (diminuant ainsi les réserves dans sa société), il reste une plus-value imposable nette de 3Mio€. Le montant de 1Mio€ étant exonéré, la taxe plus-value s’élèvera à 25.000€ (1,25%*2.000.000€), soit une taxe de 0,83%.
- Un investisseur belge vend son investissement dans une société belge pharmaceutique spécialisée dans les médicaments en vente libre. Il détient 50% dans la société et réalise une plus-value nette de 1,45 milliards d’euros. Le montant de 1 Mio€ étant exonéré, la taxe plus-value s’élèvera à 144.225.000€, soit une taxe de 9,95%.